22 mars 2003

A ce sujet, il m'est venu une réflexion particulièrement effrayante à propos du 11 septembre... j'ai vu un recueil de courts métrages fait par 11 pays du monde qui traitaient du thème de la catastrophe du 11 septembre. Comme je commençai à regarder, je revoyais en mémoire les événements... la stupeur de voir la tour s'effondrer... la surprise de voir les médias américains comme européens sombrer en pleine frénésie... et par dessus tout la conviction intime que je venais à l'instant de vivre un des moments les plus forts de mon existence, que c'était bien là ce que les vieux poussiéreux de la Sorbonne nomment l'Histoire.
Et pourtant chacun des courts métrages du film, malgré leurs différences, exprimait le même point de vue : le 11 septembre, c'est dur, mais chacun ses problèmes. Toutes ces oeuvres faisaient preuve d'une insensibilité inconcevable vis à vis des victimes, et surtout vis à vis des Etats-Unis en tant que nation attaquée. J'en était abasourdi tellement cela me paraissait impossible : quoi, on fait un film sur la catastrophe, et qu'est-ce qu'on dit ? Aux quatre coins du globe, on a ses propres problèmes, et les Etats-Unis, on s'en fout.
Passé le choc, il a fallu me rendre à l'évidence. Moi aussi, les Etats-Unis, je m'en foutais. Ce n'est pas de l'insensibilité, et surtout pas de l'hostilité anti-américaine, non, c'est juste que ce monde est une vallée de larmes et que des morts injustes, il y en a tous les jours dans tous les coins du monde.
Cela ne rend pas ces morts moins terribles. Cela fait juste qu'à force, on s'en fout.
Je regarde CNN, des bombes explosent, des sirènes retentissent, ds gens meurent pour rien. Comme toujours.
Passé le choc des images, je m'en fous.
Est-ce que c'est cela, la société de "mass media" ?

21 mars 2003

Demain tu te réveilles sous les bombardements.
Demain tout à coup tu ne sais plus où sont les gens que tu aimes et s'ils ont survécu.
Demain il n'y a plus l'eau courante, plus d'électricité. Tes voisins font brûler ta maison.
Demain tu ne peux plus traverser la rue, c'est trop dangereux.
Demain tu as peur que tes soeurs soient enlevées et violées, peur des souffrances lorsqu'ils te feront manger ton sexe ou ta langue.
Demain tu te réveilles, c'est l'enfer sur terre. Et le monde s'en balance.

Nous n'en ferons pas plus pour la Tchétchénie que pour la Bosnie.
Pour l'Irak, nous nous contenterons de regarder tomber les bombes à la télévision.

Ce genre de façon de s'en prendre plein la gueule, c'est trop n'est-ce pas ? On n'arrive même pas se l'imaginer, on n'arrive pas vraiment à se rapprocher de tant de souffrance. Nous ne sommes pas dans la même galère, et chacun chez soi.

20 mars 2003

Je dirai qu'il peut y avoir contradiction à la première vue, mais que finalement ça se tient...
En effet, Dieu est forcément majuscule en tant que Dieu de tous les hommes, qu'entité que nous partageons tous... mais mon Dieu à moi, lui, l'image que je m'en fais, cette petite divinité intime et sympathique, elle qui a une influence sur mon existence (ou du moins je l'imagine), ce Dieu là est mesquin et minuscule, mais malgré toutes ses erreurs je l'aime bien quand même.
La raison pour cette empathie ? Ce Dieu intime s'en prend plein la gueule, il a fini par attirer ma sympathie, on est dans la même galère, lui et moi.
Pour Saddam c'est la même chose. Je n'avais pourtant rien qui me rapprochait de lui, cet infect dictateur à moitié fou qui assassiné des milliers de personnes. Mais il s'en est pris plein la gueule, il est victime d'une haine injuste de la part d'un "ennemi commun", je finis par me dire que ce petit moustachu ventripotent m'est plus sympathique que ce vieux bigot tout sec à l'accent du Texas.
Finalement, pour me plaire, il faut s'en prendre plein la gueule. Je n'aime pas les gens heureux et en bonne santé. Je n'aime pas les gens qu'on aime. Alors quand Dieu est haï, il me semble proche, et quand il est aimé, son inexistence m'apparait absolument certaine.
J'espère être clair, heum ...
(Bon et bien, je vois.
"Dieu est forcément majuscule" et 5 jours plus tard,
"Dieu n'est pas la majuscule pour moi")

Pour l'instant tout va bien. Ce n'est pas le moment de paniquer. Disent-ils à la radio. Tout est allé très vite. Et on dit et on redit la même chose et ça n'arrêtera pas avant qu'on passe à autre chose. Le calme est revenu dans les rues de Bagdad en fin de matinée. La télévision officielle irakienne...

Et des frappes chirurugicales.

Y'a pas à être jaloux de Dieu. La colère des hommes contre Dieu est grande, on lui reproche beaucoup, on lui reproche, entre autres, de nous avoir laissé libres de faire du mal.

Heureusement que G.W. Bush est là pour faire la guerre contre les Forces du Mal.

16 mars 2003

Il m'arrive très souvent de médire sur Dieu, et pourtant je ne le connais pas. Ce n'est pourtant pas dans mes habitudes de casser du sucre sur les gens que je ne connais pas.
Parfois je me dis que je dois être jaloux de Dieu. C'est vrai, il est tellement génial, tout lui réussit : s'il fait quelque chose de bien on continuera à en chanter les louanges des millénaires plus tard. Moi la majorité du temps on ne le remarque même pas. S'il échoue, on baisse la tête tristement en se disant que ses desseins sont impénétrables. Tandis que mes erreurs à moi sont montrées du doigt, analysées, décortiquées, amplifiées puis enfin reprochées. Dans le fond il y a vraiment de quoi être jaloux.
Et un type comme ça essaie de me faire la leçon ??
Non, Dieu n'est pas la majuscule pour moi ; il lui faudrait être mon égal, se mettre à mon niveau, pour que je puisse lui accorder ce titre.

14 mars 2003

Dieu est étonnant la plupart du temps. Et les gens qui se prennent pour Dieu. Un petit point minuscule dans un univers que personne ne comprend, tout à coup, dit qu'il est Dieu. Dieu, infiniment.

C'est vrai la vie est trop petite, il n'est pas inutile d'essayer de la grandir. Et pourquoi pas en gueulant dans la rue qui oui, il faut s'insurger de cette petitesse, que oui, il y a une autre dimension à la vie, une dimension majuscule, que oui, "c'est moi Dieu".

Car Dieu est un peu en tout le monde, tout le monde est un peu en Dieu. C'est bien la définition de l'infini de Dieu, indéfini, indéfinissable.

11 mars 2003

Dieu est forcément majuscule. Il est le commencement, il est la majesté. Nous ne sommes que des minuscules.
Mais que serait le monde sans les hommes ? L'univers sans les étoiles ? Un Pot-au-feu sans viande ?
Parfois il me vient à l'esprit que la majuscule est l'élan initial et superbe, l'acte héroïque qui vient motiver le coeur des indécis et pousser les minuscules à suivre; pourtant ensuite ce sont elles qui doivent équilibrer l'acte qui partait trop loin et s'en allait s'écraser quelque part. Dieu a généré notre monde dans une course éfrénée vers la création; j'y trouve certes la beauté mais pas la sagesse, il y a les idées pour faire quelque chose de grand mais les finitions laissent à désirer. Dieu est un artiste génial mais aussi prétentieux et brouillon : il nous a donné les matières première et une ligne directrice, puis il attend que nous achevions son oeuvre en peaufinant les détails. Sans doute se croit-il trop précieux pour mettre les mains dans le bouillon.
La majuscule ne se risque jamais à quitter sa confortable place initiale.
Mais je reprocherai tout ceci à Dieu en silence...

10 mars 2003

sensiblement rédhibitoire.
Il fait nuit, il fait noir.
Règne du silence.

"dans l'interminable ennui de la plaine
la neige incertaine luit comme du sable"...


C'est le moment de recommencer un mondE.
Un monde qui finirait majusculeusement.

Le monde commence la nuit, c'est un fait.
La nuit où dans le silence on rit, dans le silence, on chuchote ou l'on crie, de plaisir.

Le monde commence la nuit, c'est parfait, entre les eaux de pluie et les eaux de l'abîme.

"et Dieu dit : "Que la lumière soit !""
"Il y eut un soir, il y eut un matin : premier jour"

6 mars 2003

L’embarras.
Qui ne s’est jamais retrouvé embarrassé ? Qui ne s’est jamais senti mal à l’aise, déplacé de force dans une situation souvent inextricable et terriblement gênante ? Qui n’a jamais eu le sentiment que les événements sonnaient faux, qu’il fallait que quelque chose se produise mais sans savoir quoi ?
Et si ce bruit soudain vous réveille en pleine nuit ? Il y a un moment de flottement, on est encore tout groggy sans bien se rendre compte qui l’on est et où l’on est. Et puis petit à petit les paupières s’ouvrent. Yeux qui piquent. Image floue. 4h00 du matin. Gorge râpeuse, très sèche. On finit par bien l’entendre ce bruit, on ne l’a pas rêvé, aucune erreur possible : un voisin joue de la guitare à quatre heures du matin !
Bien entendu, on aimerait attendre que ça se passe, prendre le temps de s’assoupir petit à petit jusqu’à se rendormir, si on se lève il sera trop tard et on sera réveillé tout à fait, extirpé de cette douce torpeur matinale pendant laquelle tout est lent, chaud, et que les draps sont doux.
Mais à côté, dans le lit, la femme ronchonne :
« Putain de merde de guitare 4h00 du mat’ j’y crois pas bordel chéri tu es un homme que diable va faire cesser ce bruit immédiatement »
C’est soudain devenu une question d’honneur : il faut se lever et assumer son rôle masculin et viril. Qui est l’homme ici ? Qui a les couilles pour aller éclater la tête de ce joueur de guitare ? Alors on rampe hors du lit, on glisse comme une limace vers la penderie, les vêtements sont déjà au sale, tant pis, on les remet quand même en les dénichant dans le panier malodorant, et puis il faut allumer la lumière pour trouver ses chaussures, les paupières se font alors si lourdes, les yeux sont réduits à un filet minuscule de lumière. C’est déjà trop, on a de la lumière mais on préfère fermer les yeux.
Enfin on est prêt à jouer son rôle de voisin mécontent, on sort, pas de doute, c’est bien une guitare qui vient d’au dessus. On attend quelques secondes, un autre voisin a-t-il déjà eu le courage d’y aller ?

Non. On est le premier. Plus moyen de se défiler, il faut y aller. On frappe à la porte doucement : attention à ne pas sonner, il ne faut pas faire trop de bruit, y’a des gens qui dorment ici. La guitare se tait enfin, la porte s’ouvre en un feulement discret. C’est une jeune fille dépenaillée, l’instrument fatidique à la main. Elle attend quelque chose, visiblement, une remarque, un cri, une gifle, n’importe quoi, mais elle attend. Il faut réagir. Le moment est venu.
« Voilà heum je me disais comme ça étant donné qu’il est quatre heures du matin vous voyez est-ce que ce serait possible de faire moins de bruit hein des fois parce que moi j’essaie de dormir et forcément voilà quoi hé hé c’est pas que j’aime pas la guitare vous jouez très bien c’est très joli mais voilà quand même je suis votre voisin du dessous au fait bonjour. »
Moment légèrement tendu. Pas de réaction de la jeune fille. Puis enfin, elle rajuste ses lunettes sur son front et dit :
« Non j’ai envie de jouer de la guitare et je vous emmerde monsieur le voisin bonsoir. »
Elle referme la porte.
Le bruit de guitare reprend.
L’embarras arrive.
J’en viens au fameux silence majuscule… cet univers n’est qu’embarras et gêne continue, il y a toujours du bruit partout, aucun silence nulle part… peut-être à l’origine du monde y avait-il le silence ? Et enfin, la paix ? La quiétude, le bonheur, l’ataraxie ? Au début du monde, au commencement de la phrase, il y a la majuscule et le silence. Ensuite il n’y a que des minuscules et du boucan. Comment retrouver la majuscule du silence ?
Et si on recommençait un monde, pour voir ?

3 mars 2003

Voilà, j'ai trouvé un titre au blog.
C'est ridicule, évidemment.

Majuscule, ça doit venir d'une chanson de Noir Désir. (mais enfin, chez moi, il n'y a pas grand chose qui ne vienne pas d'une chanson, et dans Noir Desir, il y a vraiment à boire et à manger)
Silence, parce que tout celà finalement c'est de la communication silencieuse. Mis à part le bruit des touches, y compris celui si particulier de la barre d'espace. Mis à part le si doux bruit du modem.
pidibip crrcchhhccrsxxxxxxxx pidou, pidou pi ! pidou, pidou pi!
ccrrrcchchchcxxxx pidou, pidou pi! pidou, pidou pi !

Parce que dans le silence on est plus tranquille pour dire des bêtises. Parce que je sais bien que The Penguin a des réserves illimitées pour écrire des bêtises. Ce n'en sont pas toujours, mais il faut bien justifier tout ça : et la justification c'est que c'est pour amuser les gens. Ca marche. Ca les amuse, la plupart du temps.

Ce soir mon appart essaye de rester silencieux. Parce que la nuit dernière, prise d'une frénésie créative, j'ai un peu joué de la guitare à 3/4 heures du matin. Ce n'est pas la première fois que j'empêche la voisine de dormir, mais c'est la première fois qu'elle vient sonner chez moi pour me le dire. Je me sens tout à fait conne, du coup, forcément.
Ce soir silence. Silence Majuscule.